« Tel est pris qui croyait prendre! » C'est très certainement ce qu'a dit le scorpion à la corneille (dans cet adage d'Érasme, vu il y a quelques semaines). Si le sens est sensiblement identique, l'origine diffère. On vous explique tout. Le rat débile et le rat déchante… Tel est pris qui croyait prendre. Cette morale conclut la fable de Jean de la Fontaine Le rat et l'huître. Le fabuliste nous y raconte avec humour les aventures d'un rat un peu sot qui part découvrir le monde. Le muridé tombe bientôt sur des huîtres fermées, qu'il prend pour des navires. Quand l'une d'elles finit par s'ouvrir, apercevant cette chair délicate, le rat pense faire un bon dîner. Il glisse la tête dans la coquille d'huître… qui se referme aussitôt et le rongeur se retrouve coincé. Caramba, encore rat é! Et La Fontaine de conclure: Cette fable contient plus d'un enseignement: Nous y voyons premièrement Que ceux qui n'ont du monde aucune expérience Sont, aux moindres objets, frappés d'étonnement. Et puis nous y pouvons apprendre Que tel est pris qui croyait prendre.
Le Rat et l'Huître, texte lu par Micha Lescot (avec Le Lion et le Rat, Le Rat et l'Éléphant, Le Combat des Rats et des Belettes, Conseil tenu par les rats, La Ligue des rats, La Grenouille et le Rat, Le Rat de ville et le Rat des champs, Le Rat qui s'est retiré du monde) dans l'émission Avec La Fontaine, le rat philosophe diffusée sur France Culture le 28 avril 2020 Précédé par Suivi par Livre VIII des Fables de Jean de La Fontaine L'Ours et l'amateur des jardins
Livre VIII – Fable 9 (1678) Un petit dessin vaut parfois mieux qu'un long discours… (Illustration de Gustave Doré – 1876). Tel est pris qui croyait prendre: le sens moderne La morale devient proverbe et perdure jusqu'à nos jours. Le verbe prendre procède ici de l'idée d'avoir ou de mettre une chose/personne en sa possession et de la piéger, la tromper, etc… [1] Le proverbe signifie que celui qui pense tromper autrui devient en fait victime de sa machination. Une expression proche de l' arroseur arrosé … mais ceci est une autre histoire! La Fontaine et ses sources (littéraires) Un mot sur l'inspiration de Jean de La Fontaine avant de conclure. Il existe deux sources possibles. La première (la plus courante) vient des « Emblèmes » [2] d'Alciat [3]. La fable serait une reprise de l'emblème XCIV (94) qui s'intitule: « Captivus ob gulam » (« Prisonnier à cause de la gourmandise »). La seconde hypothèse évoque un sonnet du XVIe siècle. Il s'agit d'un texte de Gilles Romain, « Le Rat domestique et l'Ouytre », tiré du recueil Les Fables d'Ésope et d'autres en rime française (1595).
Tout d'abord, du premier jusqu'au vingtième vers, l'auteur relate le départ du rat et son voyage, avec l'exposition (vers 1-2), puis l'émerveillement du rat (vers 3-12), et enfin le discours arrogant du rat (vers 13-20). Dans un second temps, c'est à dire du vers 21 au vers 33, le fabuliste expose la rencontre du rat avec l'huitre, avec notamment la description de l'huitre (vers 21-29), et la chute inattendue et distrayante (vers 30-33). Enfin, des vers 34 à 39, l'écrivain formule une morale explicite. D. La versification -Dans ce récit, le fabuliste joue sur la musicalité des mots grâce à de nombreux procédés de versifications. Cette musicalité, permet à l'auteur d'amuser le lecteur, tout en concentrant son intention sur des notions clefs qui illustrent la morale. Ainsi, l'apologue est enrichi par une multitude de schémas rimes: Des rimes croisées: notamment des vers 1 à 4, avec les mots à la rime suivant: « Cervelle »/« Sous »/« Javelle »/« Trou ». Des rimes plates, des vers 9 à 12, avec les mots à la rime suivants: « arrive »/« rive »/« d'abord »/« bord ».